Maudy Piot : une femme de coeur
Ardente combattante en faveur des femmes en situation de handicap, Maudy Piot, présidente et fondatrice de l’association *«Femmes pour le dire, femmes pour agir»* (FDFA) et membre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), est décédée le 25 décembre, à l’âge de 77 ans. Retour sur le parcours d’une battante.
Maudy Piot s’est battue jusqu’au bout. Le 12 décembre, elle avait quitté l’hôpital pour se rendre au conseil d’administration de «Femmes pour le dire, femmes pour agir». Malgré la maladie, elle avait tenu à être présente. Et elle l’avait été pleinement, organisant aussi, avec toutes les forces qui lui restaient, la fête prochaine des 15 ans d’une belle histoire consacrée à toutes celles qui n’ont ni les mots ni la force pour pouvoir dire non.
L’histoire d’une vie
Cette différence liée au handicap, Maudy Piot l’a personnellement vécue. Enfant, elle est atteinte d’une très forte myopie. À l’âge de 17 ans, elle apprend qu’elle souffre de rétinite pigmentaire, une maladie génétique évoluant fatalement vers la cécité. Elle en fera sa force. Très tôt, elle s’engage dans les milieux syndicaux et côtoie le monde des associations pour personnes aveugles. Puis se rebelle lorsqu’elle constate combien la voix des femmes y est faible et sous-représentée, et l’ambiance au misérabilisme. Pour les femmes, elle rêve d’un autre monde qui verra le jour en 2003, avec la création d’une association rassemblant tous les handicaps, qu’ils soient moteurs, sensoriels, intellectuels ou psychiques (voir page 77). « C’est à cette occasion que j’ai rencontré Maudy pour la première fois », relate son amie Claire Desaint, vice-présidente de FDFA. « D’emblée, j’ai été fascinée par son charisme, son dynamisme, sa grande finesse d’analyse. Elle refusait que l’identité d’une femme se résume à son handicap. Pour elle, on était femme et citoyenne avant tout ! Avec des idées, des revendications, des peurs, des désirs... »
Le sens de l’autre
Maudy avait renoncé au métier d’infirmière. Après avoir exercé plusieurs années en tant que kinésithérapeute, elle s’était définitivement tournée vers la psychanalyse et l’écoute des autres. Sa capacité à entraîner était son arme. Elle avait rallié à son combat le sociologue Alain Piot, son époux.
« Je la revois encore s’avançant à la tribune, parfaitement guidée par son chien Tchadou », se souvient Claire Desaint, très émue. « Entre eux aussi, c’était une véritable histoire d’amour. Lorsque Tchadou a été trop vieux, elle s’est démenée pour lui trouver un foyer chaleureux. Et il est mort dans ses bras. »
Un numéro au service des femmes
Maudy Piot n’acceptait pas que 80 % des femmes handicapées (chiffre de l’Union européenne repris par l’Onu) soient victimes de violences de la part de leur entourage proche. Elle a donc ouvert en mars 2015, au sein de l’association, ce numéro de téléphone : 01 40 47 06 06, spécifiquement dévolu à l’écoute des femmes handicapées. Il s’agissait de permettre à ces femmes dont la parole était oubliée d’exprimer les violences subies, puis de les aider à se reconstruire.